The Velvet Sundown : quand une “bande” IA défie la propriété intellectuelle musicale

En juin 2025, un groupe de rock nommé The Velvet Sundown a émergé sur Spotify, atteignant des centaines de milliers d’auditeurs presque instantanément, avant de révéler une réalité surprenante : il est entièrement créé par intelligence artificielle. Cette révélation soulève un débat brûlant sur la propriété intellectuelle. Qui détient les droits sur une œuvre composée, chantée, et incarnée par des entités générées par IA ? Et ce phénomène menace-t-il les créateurs humains et la chaîne de valeur musicale ?

Une “bande” virtuelle, un succès trompeur

Une réussite marketing sans artistes

Avec plus de 550 000 auditeurs mensuels en quelques semaines, The Velvet Sundown a sorti deux albums aux sonorités rock psychédélique, composés par IA via des outils comme Suno, et accompagnés de visuels créés par intelligence artificielle. L’illusion est presque parfaite : biographies fictives, images esthétiques, compte Instagram stylisé et playlistées via algorithmes — jusqu’à l’admission du caractère entièrement IA du projet, qualifié de « provocation artistique » .

Un modèle économique inquiétant

L’astuce promotionnelle pourrait être le recours à des services de promotion payante. Certains évoquent l’usage de “stream-farms” ou de bots pour gonfler les chiffres d’écoute, avant que les algorithmes de Spotify n’amplifient la diffusion . Le résultat : une œuvre artificielle monétisée au même titre qu’un vrai groupe, prélevant une part des revenus publicitaires tout en évacuant les droits aux artistes réels.

Une remise en question de la chaîne de droits musicaux

Droits d’auteur sans auteur humain

Si les morceaux sont générés par IA, à qui reviendraient les droits d’auteur ? Aucune personne physique ne revendique la création : ni compositeur, ni interprète, ni producteur traditionnel. Les lois actuelles exigent une contribution humaine pour qu’un morceau soit protégeable ; The Velvet Sundown se situe donc dans une zone grise juridique.

Un précédent dangereux pour la musique humaine

Les sociétés de gestion collective et des artistes comme Elton John, Paul McCartney et Dua Lipa réclament une régulation urgente. Le succès de groupes virtuels pourrait détourner une part conséquente des revenus, tout en ne reversant aucune compensation aux auteurs dont les œuvres auraient alimenté les modèles de génération. Le risque est double : concurrence déloyale aux musiciens humains, et dilution de la valeur artistique par des contenus génériques programmés.

Le cas The Velvet Sundown est révélateur d’un tournant de l’industrie musicale : l’IA devient capable de créer, diffuser et monétiser des œuvres sans filiation humaine. Cette dynamique menace la rémunération des artistes, fragilise les mécanismes de financement culturel, et reste en marge des cadres juridiques actuels.

Pour encadrer cette évolution, il devient essentiel :

  • d’exiger des plateformes (Spotify, Apple Music…) qu’elles identifient explicitement les contenus générés par IA ;
  • de créer des licences obligatoires pour les œuvres utilisées pour entraîner ces modèles ;
  • d’instaurer un cadre contractuel garantissant que les modèles d’IA reversent une part des revenus aux ayants droit, même de manière automatisée.

La montée de l’IA musicale appelle à repenser les règles de la création et de la distribution artistique. Une remise à plat des droits d’auteur, adaptée à l’ère numérique, semble indispensable. L’enjeu : préserver un écosystème culturel équilibré, où la valeur de l’expression humaine n’est pas diluée par des algorithmes trop rentables.