Quand des fans reprennent les rênes de Commodore : renaissance ou simple nostalgie ?

Depuis sa création dans les années 1950, la marque Commodore a évolué d’une référence des machines à écrire aux icônes de l’informatique personnelle — PET, Commodore 64, Amiga — avant de sombrer dans les méandres de faillites et de chaînes de rachats. En juin 2025, une nouvelle page s’écrit : la marque reçoit un nouvel élan, cette fois entre les mains de créateurs passionnés et de fans, prêts à revitaliser son identité historique. Ce transfert de droits marque un tournant stratégique dans la gestion de la propriété intellectuelle liée à un nom mythique.

Un passage de flambeau atypique : une marque gérée par ses fans

Après la disparition de Commodore en 1994, le nom a changé plusieurs fois de propriétaires : Escom, Tulip, Gateway, jusqu’à Commodore Corporation B.V., qui gère les licences actuelles, mais exige des droits de licence élevés, ce qui a empêché un logo officiel sur des produits comme le clavier 8BitDo ou le C64 Mini.

Face à cette situation, Christian Simpson (alias Perifractic), créateur de Retro Recipes sur YouTube, révèle qu’il a eu l’opportunité de reprendre les droits mondiaux de la marque Commodore. Son projet : faciliter l’accès à la licence pour les passionnés de rétrotech, à un coût plus adapté à une production artisanale ou à faible volume. Une démarche inédite, où un fan expérimenté récupère un nom depuis longtemps enterré, dans le but de le faire revivre dans le monde matériel et numérique.

Enjeux et perspectives d’un modèle de propriété intellectuelle alternatif

Vers une commercialisation durable et collective

Le projet porté par Simpson et la communauté établit un modèle de licence communautaire : une redevance de 6–6,5 % sur le chiffre de vente envisagée, qui permettrait la production de périphériques, smartphones aux couleurs Commodore ou accessoires dérivés, tout en rendant la marque accessible aux micro-entreprises. Cette formule s’inspire d’initiatives similaires comme Atari Age, où la marque renaît au service du patrimoine.

Les limites du retour de Commodore

Néanmoins, la valeur de Commodore comme marque mondiale reste limitée : l’entreprise originale est morte depuis trente ans, ses logos sont devenus omniprésents mais souvent dépourvus d’autorisation. Il ne s’agit aujourd’hui que des droits sur le nom et les logos iconiques ; les brevets ou éléments techniques comme ceux liés à AmigaOS sont exclus. Ceci explique pourquoi des produits commémoratifs peuvent arborer le logo sans porter le nom officiel, tant que la licence est jugée trop coûteuse par Commodore B.V.

Cette réappropriation de Commodore par ses fans illustre une trajectoire originale de propriété intellectuelle, où la gestion d’une marque historique se fait directement entre passionnés. Ce modèle pose des interrogations fortes : comment réguler l’usage d’un nom devenu mythique sans transformer la marque en simple logo décoratif ? Si cette approche communautaire peut revitaliser l’héritage Commodore, elle nécessitera une gouvernance rigoureuse — pour équilibrer qualité, authenticité et droits de propriété.

Au-delà de la nostalgie, ce scénario ouvre la voie à une réflexion plus globale : lorsqu’une marque disparue subsiste dans la culture collective, quel avenir doit-on lui donner ? Cette résurrection, d’abord symbolique, pourrait-elle se transformer en plateforme matérielle et logicielle innovante ? Réponse à venir avec la publication des prochains projets autour de la marque.